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La loi Santé du 26 janvier 2016 a introduit deux articles relatifs aux mannequins, dont les photographes devront tenir compte dans leur pratique. L’objectif de ces dispositions est si manifeste que le législateur n’a même pas pris le soin de le préciser : lutter contre la maigreur excessive et l’anorexie des mannequins.
Au stade de la préparation du shooting : obligation de vérifier l’existence d’un certificat délivré au mannequin par un médecin
L’article 20 de la loi Santé crée ainsi un nouvel article dans le Code du travail, qui prévoit que l’exercice de l’activité de mannequin est conditionné à la délivrance d’un certificat médical. Ce certificat atteste que l’évaluation globale de l’état de santé du mannequin, évalué notamment au regard de son indice de masse corporelle, est compatible avec l’exercice de son métier (nouvel article L. 7123-2-1 du Code du travail). On notera que le critère retenu n’est pas le seul poids du mannequin, mais son état de santé global, ce qui permet d’englober de nombreux autres indices physiologiques du potentiel mal-être du mannequin.
L’agence de mannequin ou le photographe qui s’assurent le concours d’un mannequin devront s’assurer de l’existence de ce certificat. En cas de non-respect, ils encourent 75.000 euros d’amende et 6 mois de prison (le double en cas de récidive) : « Le fait, pour toute personne exploitant une agence de mannequins ou s’assurant, moyennant rémunération, le concours d’un mannequin, de ne pas respecter l’obligation prévue à l’article L. 7123-2-1 est puni de six mois d’emprisonnement et de 75.000 € d’amende » (nouvel article L. 7123-27 du Code du travail).
Les modalités d’application seront déterminées par un arrêté des ministres chargés de la santé et du travail, pris après avis de la Haute Autorité de santé.
Au stade de la post-production : obligation d’apposer la mention « Photographie retouchée »
L’article 19 de la loi Santé crée un nouvel article dans le Code du Travail, qui prévoit que les photographies à usage commercial de mannequins, dont l’apparence corporelle a été modifiée par un logiciel de traitement d’image afin d’affiner ou d’épaissir la silhouette du mannequin, doivent être accompagnées de la mention : “ Photographie retouchée“ (nouvel article L. 2133-2 du Code du travail).
La violation de cette obligation pourra entraîner pour son auteur la condamnation à 37 500 euros d’amende, le montant de cette amende pouvant être porté à 30 % des dépenses consacrées à la publicité.
Les modalités d’application et de contrôle permettant la mise en œuvre de ces dispositions seront déterminées par décret, pris après consultation de l’autorité de régulation professionnelle de la publicité et de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé.
Ces dispositions entreront en vigueur à la date de publication du décret précité, et au plus tard le 1er janvier 2017, ce qui laisse peu de temps aux agences et photographes concernés pour adapter leurs pratiques.
Le champ d’application des nouvelles mesures : peut-être plus large qu’on ne le croit !
Le champ d’application de ces dispositions de la loi Santé est peut-être plus large qu’il n’y paraît à première lecture, et il faudra attendre les premières décisions de condamnation pour se faire une idée plus précise. Mais on a déjà indiqué dans une précédente contribution que les notions de « mannequin » et de « modèle d’art » sont largement confondues, aujourd’hui…
Une mesure abandonnée : l’interdiction des sites web « pro-ana »
On peut en revanche regretter que la proposition visant à interdire les sites web « pro-ana » n’ait finalement pas été retenue par le législateur. Il avait été envisagé une sanction d’un an d’emprisonnement et de 10.000 euros d’amende concernant cette pratique, qui finalement n’est pas interdite par la loi Santé, de peur semble-t-il de fragiliser davantage les personnes anorexiques concernées. Il relève pourtant de l’intérêt général que ce type de sites soit interdit, à terme.
Attention, cette contribution n’est en aucun cas une consultation juridique et n’engage en rien la responsabilité de son auteur. Conformément aux règles déontologiques qui régissent la profession d’avocat, notamment le secret professionnel, l’avocat ne peut répondre aux questions que dans le cadre d’un entretien sollicité par un client, en privé.
Merci beaucoup pour nous aiguiser sur cette réalité si facilement négligée. Savez-vous s’il existe le pendant de ces règles au Canada, plus précisément au Québec? Merci!
Un bon article avec des informations importantes. Mon seul commentaire est qu’il est dommage que nous avons besoin de la loi que je ne vois pas pourquoi l’industrie exige toujours des mannequins anorexiques.
Merci à vous ! C’est d’autant plus regrettable que la loi ne peut pas tout, ce que nos représentants semblent oublier souvent…
Sais-tu si cela concerne seulement la silhouette ou s’il y a des nuances dans la loi? Par exemple, entre amincir une silhouette et juste blanchir les dents, changer la couleur des cheveux ou de la peau ou effacer rides et tatouages, c’est définitivement pas la même chose…
Pour l’instant, il faut en rester aux termes de la loi. Mais on ne devrait pas tarder à avoir aussi de la jurisprudence pour savoir où placer le curseur !
Certes la loi santé semble être d’une grande importance (dans ce domaine) !!! Si l’on contraignait nos » chers » et élus à de telles contraintes…Totalement ridicule (dans le texte) combien de députés, sénateurs, ministres…seraient recalés ?
TRES bien reste à donner une autre image de la femme et à ne pas soumettre les jeunes filles au diktat de la mode.La santé avant tout, et lutter contre la « mal bouffe »apportera d’avantage aux jeunes. »Mens sana in corporel sano »
La définition médicale de l’anorexie est une perte de l’appétit qui entraîne chez le patient une incapacité à se nourrir correctement. Elle est soit d’origine psychique (anorexie mentale) ou liée à une maladie (états grippaux, cancers…). Dans le cas du mannequinat cette anorexie peut être induite chez des personnes jeunes simplement pour qu’elles puissent maintenir des critères d’exigence de canons de mode, définis pour des besoins publicitaires et mercantiles, afin d’entreprendre ou poursuivre une carrière professionnelle et pouvant avoir parfois des conséquences considérablement destructives chez ces personnes, voire irréversibles. Cette loi est une bonne mesure afin de protéger les individus qu’une telle dérive puisse avoir lieu. Cet article résume clairement la loi santé de janvier 2016. Il est a espérer qu’elle fasse jurisprudence et qu’elle s’étende au niveau international. Pour ce qui est de la mention « photographie retouchée » le consentement du modèle ou mannequin est-il demandé pour que celle ci soit mentionnée? Car son interprétation ouvre la porte à de nombreuses considérations aussi bien de la part du modèle que des personnes la lisant. Je ne suis pas photographe professionnel, seulement un passionné, et ne connais pas toutes les exigences du métier de photographe de mode et encore moins les contraintes qui sont imposées, mais dont je me doute. La question que je me pose est: a-t-on vraiment besoin d’imposer de tels canons artistiques dans le domaine de la mode ? N’est-ce pas au photographe de mettre en valeur son propos en choisissant l’angle de prise de vue, la lumière etc…, ce qu’il fait déjà, sans avoir à recourir systématiquement à de tels artifices. Peut-être que mon propos dépasse l’objet de cet article que j’ai beaucoup apprécié.
Super article en espérant que ce ne soit pas un coup d’épée dans l’eau et que cette loi soit aussi valable pour les défilés de haute couture.
Super article !! 😉
Merci à vous !
C’est à espérer que d’autres pays suivront cet exemple.
Attendons de voir comment le respect de cette loi sera assuré…
Excellent article.
Merci à vous !